Un couple de Français originaires de l'Ardèche a été tué par balles dimanche après-midi dans la capitale haïtienne de Port-au-Prince, où ils venaient d'arriver pour une adoption. Ces deux Français ont été abattus, a indiqué une responsable de l'ambassade de France à Port-au-Prince, sans apporter pour l'instant de précisions sur le lieu exact ou les circonstances du drame. Elle n'a pas non plus indiqué les motivations derrière ces meurtres, dans ce pays plongé dans une grave crise politique et sociale.
Le ministère français des Affaires étrangères a fait part, dans un communiqué, de «sa grande émotion» après le décès de «deux compatriotes en Haïti des suites d'une agression», assurant que l'ambassade de France était «en contact avec les autorités locales pour que toute la lumière soit faite sur ce drame». Selon deux sources concordantes, le couple était venu sur l'île «pour adopter».
«Le couple avait obtenu son premier agrément en 2013, renouvelé en 2018. Leur voyage était organisé dans le but d'une visite de convivialité, ils ne seraient pas repartis avec l'enfant», a précisé au Figaro le conseil départemental de l'Ardèche. Haïti s'enfonce un peu plus chaque jour dans une grave crise sociale et politique. Les manifestations à répétition, souvent émaillées de violences, réclament depuis le mois d'août la démission du président Jovenel Moïse et la violence des gangs inquiète la société civile.
Manifestations à répétition
Ce couple de Français se rendait pour la première fois en Haïti dans le cadre d'une procédure d'adoption gérée depuis trois ans par l'Agence Française de l'Adoption (AFA). Ils devaient rencontrer pour la première fois l'enfant susceptible de leur être confié. «Ils ont fait tout ce qu'il fallait faire en termes de sécurité», a-t-on assuré à l'AFA, en allusion à l'insécurité chronique dans ce pays. Ils s'étaient notamment inscrits sur le site Ariane du Quai d'Orsay, qui permet aux ressortissants français d'enregistrer un voyage touristique, personnel ou professionnel d'une durée de moins de 6 mois dans un pays étranger.
«On leur a dit qu'un taxi, avec lequel l'AFA travaille, viendrait les chercher, afin qu'ils soient le plus possible en sécurité». «Il les a pris à aéroport pour les conduire là où ils devaient loger». Les informations sur les circonstances de l'assassinat des ressortissants français restaient, pour l'heure, partielles. Mais une source a indiqué que le couple avait été tué lors d'un vol à main armée qui a mal tourné.
Sur son site internet, le Quai d'Orsay précise que la situation en Haïti est «particulièrement tendue». «Les manifestations, accompagnées de barrages sur les principaux axes routiers et d'actes violents (jets de pierres, tirs...) sont très fréquentes. Des groupes violents sont actifs et entretiennent un climat d'insécurité», écrit la diplomatie française dans une publication datée du 24 octobre 2019, recommandant sur son site internet «de reporter tout voyage jusqu'à nouvel ordre». En 2018, 61 enfants ont été adoptés par des Français en Haïti, dont quatre via l'AFA.
42 morts
Selon l'ONU, au moins 42 personnes sont mortes depuis mi-septembre dans des manifestations organisées dans les principales villes en Haïti pour exiger la démission du président, un mouvement paralysant les activités économiques du pays. Deux manifestants ainsi qu'un journaliste d'une radio locale et un policier ont été blessés lundi dernier lors d'une manifestation de l'opposition à l'occasion de l'anniversaire de la bataille qui a mené Haïti à l'indépendance.
Marie-Yolène Gilles, militante haïtienne pour la défense des droits humains, s'est inquiétée mi-novembre de la multiplication des foyers de gangs à Port-au-Prince et en province. «On assiste à une augmentation sans limite d'actes de criminalité par des groupes armés avec le support d'officiels de l'État, par des bandes tolérées par le pouvoir politique en place», a-t-elle accusé.
Dans un entretien à l'AFP le mois dernier, le président haïtien Jovenel Moïse affirmait ne pas être «accroché à un mandat» mais n'avait annoncé aucune mesure immédiate face aux conséquences humanitaires, économiques et sociales de la crise politique.